Coulisses d’écriture
Journal de bord, réflexions, avancées mes projets de livres choix narratifs, doutes, extraits commentés.
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Il y a des livres qui s’écrivent comme une coulée. Qui débordent, qui s’imposent. Chant Brisé était de ceux-là : il m’a traversée avec urgence, en appelant tout mon souffle. A Contre-Jour, lui, procède autrement. Ce roman ne cherche pas l’émotion frontale. Il se tapit dans les recoins. Il se construit à bas bruit. Et
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Je pourrais dire que j’écris comme on respire. Mais ce serait faux. J’écris comme on retient son souffle. Quand j’écris à quelqu’un que j’aime, il ne s’agit pas d’expliquer. Ni d’être brillante. Ni de faire bonne impression. Ce n’est même pas une question d’être sincère. C’est plus trouble que ça. Plus instinctif. Plus nu. Ce
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Ce n’est pas un aveu, ni une plainte. C’est un constat. Peut-être même un territoire. J’ai longtemps cru que mes blocages étaient des ennemis. Que mes retenues étaient des freins. Que si je n’arrivais pas à tout donner, tout montrer, tout dire, c’est que quelque chose était cassé. Mais j’apprends, peu à peu, à écouter
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Pendant longtemps, je n’en voyais pas l’intérêt. Tenir un carnet ? Une distraction de plus. Une façon de s’occuper, de s’inventer un rituel d’écrivain sans écrire vraiment. Une dispersion. J’avais cette idée que le vrai travail, c’était celui du texte. Le roman. La nouvelle. Ce qu’on construit, ce qu’on polit. Pas ce flux brut, désordonné,
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Ce matin, je l’ai envoyé. Chant Brisé. À trois maisons d’édition. Trois clics. Trois décharges. Trois vides. Je croyais que je bondirais de joie, que je pleurerais, que je hurlerais dans un oreiller. Mais je n’ai rien fait. Rien. J’ai refermé l’ordinateur. J’ai regardé le plafond. Et je me suis demandé ce que je devenais
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J’écris trop. Toujours. J’ai longtemps cru que c’était un défaut à corriger. Aujourd’hui, j’y vois plutôt une matière première. Un excès nécessaire. Mais ce que je coupe ensuite n’est pas de l’ordre du surplus. Ce sont des gestes. Des phrases qui voudraient trop dire. Et ce que je garde… c’est ce que je n’arrive pas