Creux défendus

Note d’intention :
Ce texte explore la sensualité, le désir, le corps et ses vertiges. Il contient des passages explicites, à lire avec sensibilité.

Petite, on m’a dit de ne pas mettre mes doigts dans la bouche.
Ni dans le nez.
Ni dans la prise.
Ni dans les creux.
Ni dans le silence.
J’ai feint la retenue.

On m’a appris à ne pas mettre mes doigts trop profonds.
Pas toute seule.
Pas tout de suite.
J’ai feint la sagesse.

On m’a dit d’embellir mes doigts.
D’en vernir les extrémités.
De les protéger dans des gants.
De les emprisonner dans des bagues.
J’ai feint l’élégance.

Mes doigts se sont aventurés. D’eux-mêmes, un peu.
Ils ont tâtonné dans le sable.
Ils s’y sont enfouis, ont fait rouler les grains sur ma peau.
Ils n’ont pas menti.
J’ai exploré.

Puis, j’ai commencé à mettre mes doigts dans mes cheveux.
Dans mes poches.
Dans mes oreilles.
Dans l’interstice. Entre tissu et peau.
J’ai éprouvé.

J’ai mis mes doigts entre mes lèvres.
Entre mes seins.
Dans la peau d’une autre.
J’ai touché l’interdit. Et j’en ai joui.

J’ai mis mes doigts là où je voulais.
Dans ce qui est défendu.
Dans l’excentrisme.
Et c’est comme ça que j’ai commencé à me retrouver.